vendredi 27 avril 2012

La beauté de la mer

Mon album "à quai" est inspiré par l'amour que je porte à l'Atlantique et aux ports.
Voici un moment magnifique (video tirée du site Theatrum Belli) :



Frégate Latouche-Tréville en pleine tempête par Marine-Nationale

mardi 10 avril 2012

La lice et sa compagne



Image tirée des Fables de La Fontaine dont j'ai fait les illustrations (vingt trois fables). Celle-ci évoque les pièges de la "charité", la charité que l'on fait et celle qu'on reçoit. 
 La chienne de la fable prête sa hutte à sa compagne qui s'apprête à mettre au monde ses chiots. Mais une fois que la mise bas a eut lieu, sa compagne refuse de lui rendre son habitation. 
Comme dans l'histoire d'Abel et Caïn, de la Genèse, c'est le meilleur qui perd. Il perd car il juge mal des choses. Du moins c'est mon hypothèse.
Tout le malheur vient de l'histoire d'Adam et d'Ève. C'est pour cela que j'ai situé le décor de la chienne -que j'identifie à Abel - dans un jardin où trônent les deux arbres : l'arbre de vie (le tout blanc) et l'arbre de la connaissance du bien et du mal (celui qui porte les pommes et le serpent).
Reprenons le scénario de ce texte de la Genèse  (La Bible, éditions Robert Laffont, coll Bouquins, traduction de Lemaître de Sacy). Je vous propose une petite promenade au Paradis terrestre.
Plan 1
Génèse II, 9 : "...L'arbre de vie au milieu du Paradis (arbre 1)
Avec l'arbre de la science du bien et du mal"(arbre 2)
=> Il y a donc bien deux arbres 
Plan 2
Génèse II, 15 : "Le Seigneur Dieu prit donc l'homme et le mit dans le paradis de délices afin qu'il le cultivât et qu'il le gardât."
Génèse II, 16 : "Mangez de tous les fruits des arbres du Paradis ;"
=>  Dieu installe donc Adam dans le Paradis comme cultivateur et gardien
Plan3
Genèse II, 17 : "Mais ne mangez point du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal (arbre 2)
car au même temps que vous en mangerez, vous mourrez très certainement"
=> Dieu fait une restriction à propos de l'"arbre n° 2"
Plan 4
Génèse III, 1 : "Le serpent ... dit à la femme : pourquoi Dieu vous a-t-il commandé de ne pas manger du fruit de tous les arbres du Paradis ? ("tous" comprend l'arbre 1, l'arbre 2 et les autres)
=> Le serpent entreprend de poser à la femme une question qui contient en elle-même sa frustration, à cause du mot "tous". Il est insidieux.
Plan 5
Génèse III, 2 : (la femme) Nous mangeons du fruit des arbres qui sont dans le Paradis ;
Génèse III, 3 : Mais pour ce qui est du fruit de l'arbre qui est au milieu du Paradis (arbre 1),
Dieu nous a commandé de n'en point manger, et de n'y point toucher, de peur que nous ne fussions en danger de mourir (arbre 2)
=> Ève veut rétablir la vérité ; elle a donc bien entendu le "tous" du serpent. Mais peut-être, atteinte malgré elle par l'insinuation du serpent que Dieu aurait interdit "tous" les fruits, elle fait une confusion : elle dit que c'est l'arbre du "milieu" qui est celui de la science du bien et du mal (arbre 2). Or si on relit Génèse II, 9, c'est l'arbre de vie qui est au milieu (arbre 1). Elle se trompe d'arbre.
Plan 6
Génèse III, 4 : (Le serpent) "Assurément vous ne mourrez point.
Génèse III, 5 : "Mais c'est que Dieu sait qu'aussitôt que vous aurez mangé de ce fruit vos yeux seront ouverts, et vous serez comme des dieux, en connaissant le bien et le mal".
=> À aucun moment le serpent ne ment : Adam et Ève ne mourront pas s'il mange de l'arbre du milieu du jardin (arbre 1); et en effet ils connaîtront le bien et le mal s'ils mangent du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal (arbre 2) ! Le serpent profite de la confusion que fait Ève entre les deux arbres. Il répond  à deux questions à la fois. Il opère un glissement : il répond dans la même phrase au sujet de l'arbre 1 et au sujet de l'arbre 2. Il aggrave la confusion d'Ève entre les deux arbres : il ne la détrompe pas. Au contraire, il la conforte dans son erreur. Mais pas un instant il ne ment effrontément, puisque il joue sur l'imprécision. Et partant, il la trompe sur le domaine d'efficacité des deux arbres. Quand on dit que le diable se cache dans les détails !
Il est vrai aussi que Dieu n'a pas parlé directement à Ève : elle connaît cette information par Adam, de seconde main donc. Une partie de l'information s'est perdue en route peut-être.
Plan 7
=> Adam et Ève mangent le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal (arbre 2). Et Dieu s'en aperçoit.
Plan 8
Génèse III, 22 :"Et il dit (Dieu) : Voilà Adam devenu comme l'un de nous (sic ?), sachant le bien et le mal. Empêchons donc maintenant qu'il ne porte sa main à l'arbre de vie (arbre 1), qu'il ne prenne aussi de son fruit, et qu'en mangeant il ne vive éternellement".
=> Si Adam et Ève mangent le fruit de l'arbre de vie, celui-ci sera donc un antidote au fruit de la connaissance du bien et du mal : en effet ce dernier devait les faire mourir. Mais, dit Dieu, s'il mange du fruit de l'arbre de vie, ils seront éternels en plus d'avoir la connaissance du bien et du mal. le fruit de l'arbre de vie est un contre-poison  au fruit mortel de la science du bien et du mal.
Il semble que Dieu ne puisse se permettre de laisser faire cela : "il est devenu comme l'un de nous" dit-il (génèse III, 22). Adam doit rester mortel sinon il sera comme "nous" dit Dieu - y aurait-il plusieurs dieux ? - : il a la science du bien et du mal, donc il ne doit pas devenir éternel, selon Dieu. Sinon il deviendrait, lui-aussi, un dieu : est-ce là la crainte de Dieu ?
Plan 9
Génèse III, 23 : "Le seigneur Dieu le fit sortir du jardin délicieux pour travailler à la culture de la terre dont il avait été tiré
=> Voilà ! Adam et Ève sont chassés du Paradis terrestre.
Plan 10
Génèse III, 24 :"Et l'en ayant chassé, il mit des Chérubins devant le jardin des délices qui faisaient étinceler une épée de feu, pour garder le chemin qui conduisait à l'arbre de vie"

Connaissant le bien et connaissant le mal, Adam et Ève en ont une expérience si intime qu'ils ne sont plus en mesure de les distinguer. Leurs enfants non plus. Ils ne peuvent plus en avoir une vision claire. Leur jugement est maintenant biaisé, car subjectif, affaibli par la compréhension égale du bien et du mal. Comme cette petite chienne de la page de gauche qui n'est pas capable de reconnaître le mal, la méchanceté, les mauvaises intentions de sa compagne. Elle croît qu'être bonne, charitable suffit.
Ainsi, être bienveillant, bon et naïf comme Abel, personnifiée par la petite chienne mène à l'échec et à la mort. 
La vertu est trouble, la charité ambiguë sinon perverse.



La question que je me pose, c'est pourquoi Dieu lie-t-il "connaissance du Bien et du Mal" et "mort" ? 
Je ne vois qu'une réponse : c'est parce qu'elles doivent être effectivement liées. Le Bien, le Mal et la Mort vont donc ensemble. 


La connaissance du bien et du mal amène la mort et corrompt le jugement.

L'arbre de vie ne donne que la vie. Mais il permet de contrer la mort apportée par le fruit de la connaissance du bien et du mal.

J'ai l'impression que dans cette histoire la vie s'oppose aux notions de bien et de mal auxquelles il faudrait renoncer.


Malheureusement le chemin de l'arbre de vie est bloqué par l'épée de feu des deux Chérubins !